La voyance est
le terme donné à l'action ou la capacité de percevoir
des informations sans l'intermédiaire des cinq sens et sans
limitation d'espace et de temps. On réduit généralement
la voyance à la faculté de prévoir des événements
futurs; il serait plus juste de la définir par la capacité
de « connaître » une information, indépendamment
de l'espace et du temps, comme si ces deux notions n'existaient pas.
Le
voyant de métier pratique souvent la "voyance directe";
il formule une demande en vue d'« obtenir » une réponse
qu'il lui appartient ensuite d'interpréter si nécessaire.
Les
supports peuvent être très variés parmi lesquels
la boule de cristal ou une feuille blanche...
Rares
sont les praticiens qui exercent sans support : le plus répandu
est celui des cartes et des oracles ou cartomancie. L'on parlera
ici davantage d'un art divinatoire - même si la consultation
cartomancique comporte souvent des phases surgissant spontanément
et de façon incontrôlée de clairaudience ou
de clairvoyance stimulées par la lecture des cartes.
Le
Tarot lui est un outil d'interprétation symbolique : la taromancie
n'est pas de la voyance.
En
parapsychologie, la voyance relève des perceptions extra-sensorielles
et englobe la télépathie, la clairvoyance, la précognition,
la vision à distance et la rétrocognition. Qu'on y
croit ou qu'on y croit pas, la voyance est par excellence le domaine
de l'irrationnel.
Depuis qu'il existe, l'être humain a cherché à
connaître de quoi serait fait l'avenir, à déterminer
le moment propice pour entreprendre une action. Préoccupations
alimentaires, sentimentales, stratégiques, politiques...
la voyance s'est exercée dans tous les domaines de l'activité
humaine.
Parfois,
la voyance a été institutionnalisée en système.
C'est le cas dans de nombreuses civilisations de l'Antiquité.
Par exemple à Delphes, dans la Grèce antique on venait
consulter l'Oracle en demandant à ces prêtresses, les
pythies, d'interprérer leurs visions. On le retrouve dans
la mythologie où par exemple une oracle dévoile au
père d'Œdipe la punition qu'Apollon lui a réservé
s'il a un fils.
Au
cours des âges, la voyance s'est appuyée sur divers
supports : l'observation des étoiles, comètes, éclipses
et autres phénomènes astronomiques est l'un des plus
connus. Au Sud de la Mésopotamie (Irak actuel), la civilisation
de Sumer jeta les bases de l'astronomie et l'astrologie autour de
2500 avant J.C. Encouragés par les souverains, les prêtres
astronomes et astrologues ont poussé, au fil des générations,
de plus en plus loin les observations des phénomènes
météorologiques et astronomiques, dans un but prospectif.
Toutes ces connaissances nourriront les civilisations suivantes
: grecque, romaine, arabe...
1
000 ans avant J-C., dans la région du golfe du Mexique, les
Olmèques posent les bases d'une astrologie qui sera adoptée
ensuite par les civilisations toltèque, maya et aztèque.
Aujourd'hui encore, dans les Andes Centrales, les paysans continuent
d'utiliser un système de prédiction du climat datant
de l'empire Inca, basé sur l'observation des Pléiades,
afin de déterminer la date propice à la plantation
des pommes de terre.
Dans
l'ancien testament de la Bible, on trouve un interdit explicite
de la voyance (Deutéronome 18.10-12) "Qu'on ne trouve
chez toi personne qui fasse passer par le feu son fils ou sa fille,
qui s'adonne à la divination, aux augures, aux superstitions
et aux enchantements, qui ait recours aux charmes, qui consulte
les évocateurs et les sorciers, et qui interroge les morts."
L'évocation détaillée de ces pratiques mantiques
laisse à penser qu'elles étaient alors répandues
parmi les populations contemporaines des Hébreux, dans cette
région du monde.
Autour
du Ier au IVe siècle, en Grèce et à Rome, ce
fut l'apogée des haruspices, prétendant lire l'avenir
dans le comportement ou les entrailles des animaux. Cette méthode
de "prédiction" était d'un usage courant
pour juger les crimes dans la Rome antique.
À
la même époque se développa en Asie le Yi King
(ou Yi Jing) : basé sur la philosophie taoïste du Yin-Yang,
il s'appuya d'abord sur l'interprétation des fendillements
des carapaces de tortues exposées à la chaleur, puis
sur le lancer de 50 tiges d'achillée sèches. De nos
jours le jet de pièces de monnaies est fréquemment
utilisé. Cet oracle repose sur 64 figures (ou hexagrammes)
constituées par l'empilement de six traits, qui peuvent être
pleins ou brisés, mutables ou non. Par le jeu des mutations,
on arrive donc à 4 096 combinaisons possibles. L'interprétation
des hexagrammes est écrite dans le "Livre des mutations"
(Yi-King), ouvrage métaphysique taoïste de la Chine
antique, attribué au souverain Fo Hi, qui l'aurait rédigé
pendant une période d'emprisonnement. Cet antique outil d'aide
à la décision connut un regain de popularité
dans les années 60 dans certains milieux intellectuels, notamment
aux États-Unis.
Des
plantes psychotropes sont parfois utilisées pour accéder
aux visions prophétiques : le soma, une boisson hallucinogène
utilisée en Inde antique par les prêtres, leur permettait
ainsi de « voir les dieux ». Cette pratique de consommation
d'hallucinogènes à des fins divinatoires trouve probablement
son origine dans les sociétés primitives et le chamanisme.
Durant
le Moyen Âge, en Europe surtout et un peu moins en Afrique
du Nord, ce sont les astres qui vont redevenir le support préféré
des voyants : l'astrologie, ancienne mais encore marginale, prend
son essor. D'après la théorie chrétienne d'alors,
les étoiles sont en effet des disques derrière lesquels
se cachent des anges ou des chérubins, et leur mouvement
est en fait un signe. Le ciel s'organise donc en constellations,
les années en périodes zodiacales, permettant par
de savants calculs de déterminer l'horoscope. Nostradamus
fut un astrologue reconnu de son vivant (qui rencontrait et conseillait
nombre de personnalités); il a écrit un ouvrage dans
lequel il dévoile, selon lui, tous les événements
qui devraient se dérouler jusqu'en 2060 environ, date selon
lui de la fin d'un monde.
De
manière générale, diverses disciplines constituent
les "arts divinatoires" : tarot, astrologie, boule de
cristal, etc. Ces pratiques sont bien implantées dans la
société, on estime que 21% des femmes et 9% des hommes
en France ont déjà rencontré au moins une fois
un ou une voyant(e), ce qui représente environ 15 millions
de consultations par an.
Le problème de la voyance repose dans la qualité du
praticien.
L'exercice
de la voyance n'est pas une question de formation, mais de destinée.
D'autre
part l'interprétation des visions est faite par le voyant
lui-même et dépend donc en grande partie de son univers
psychique et culturel. Comme toute interprétation, celle-ci
subit en effet les interférences de la subjectivité
du voyant mais aussi de celui qui l'a consulté.
On
peut illustrer ce concept en commentant un célèbre
épisode d'oniromancie de la Bible, celui des "vaches
maigres et vaches grasses". Pharaon a fait un songe qui le
tourmente : sept vaches grasses sortant du Nil, suivies de sept
vaches faméliques qui les dévorent (Genèse
41). Aucun de ses prêtres (des voyants professionnels) n'est
capable de lui en donner la signification. C'est Joseph, un jeune
prisonnier hébreu, qui va révéler à
Pharaon la portée de son rêve. Déjà,
comme il s'agit d'un songe de souverain, il ne peut concerner que
le pays tout entier (notion d'échelle). Ensuite, Joseph prédit
que les vaches représentent des années, de prospérité
pour les grasses, et de famine pour les maigres (correspondance
symbolique). Enfin, Joseph est capable d'assortir ses prédictions
de conseils avisés (réquisitionner une partie des
récoltes et du bétail pendant les années d'abondance).
De
nombreuses expériences ont été tentées
à l'ère moderne afin de vérifier ou d'infirmer
les théories sur la voyance, en général par
les détracteurs de ce phénomène. Les astrologues
de Babylone comme les devins chinois tentaient de confronter leurs
prédictions aux faits afin d'affiner leur art. D'après
l'écrivain Cyrille Javary, le Yi King fut développé
sur la base des oracles archivés et annotés.
Nostradamus, né Michel de Nostredame, cité plus haut,
a établi des prévisions qui, de par la langue et le
style employés, sont proprement indéchiffrables (ou
à tout le moins sujettes à une foule d'interprétations
possibles ce qui, bien évidemment, multiplie les possibilités
de « tomber juste »).
Par
exemple :
Centurie
I, quatrain 25:
Perdu trouué caché de si long siecle,
Sera pasteur demy Dieu honnore:
Ains que la Lune acheue son grand siecle,
Par autres vents sera deshonnoré.
A contrario, il est des prédictions moins sujettes à
caution et réussies comme ce quatrain où il prédit
les circonstances exactes de la mort du roi Henri II :
Centurie
I, quatrain 35:
Le lion jeune le vieux surmontera,
En champs bellique par singulier duelle,
Dans cage d'or les yeux lui crèvera,
Deux classes une puis mourir mort cruelle.
Comme tous les éléments ne sont pas liés, il
est difficile de faire le tri entre des pronostics possibles et
des informations fausses, ou l'inverse, entre des informations vraies
et des pronostics irréalistes. Ainsi, certains exégètes
ont déclaré que Nostradamus aurait prédit une
guerre sanglante pour l'an 2000, qui n'eut pas lieu, mais dont certains
prétendent que les attentats du 11 septembre 2001 et de la
guerre en Irak sont des précurseurs.
A
l'inverse, pendant la Seconde Guerre Mondiale en France, les interprétations
des Centuries prédisaient la fin de l'occupation allemande
et la défaite du Reich - prises très au sérieux
par le service de propagande de la Gestapo qui en redoutait la propagation.
En
définitive, l'on conviendra qu'il y a dans les Centuries
des éléments troublants qui néanmoins ne semblent
pouvoir être compris qu'une fois les événements
advenus (et qui sont donc sans doute trop liés à l'interprétation
que l'on en fait a posteriori).
Il
en est ainsi de beaucoup de prédictions : celles de voyantes
comme Adélaïde Lenormand, la Sybille de la révolution
et de l'Empire, relatives aux morts de Marat, Saint Just et Robespierre
semblent effectives. Elle aurait aussi prédit à Napoléon
son divorce d'avec Joséphine de Beauharnais dont elle était
la cartomancienne. Mais comme souvent lorsqu'il s'agit de voyance,
on ne retient que les prédictions réussies et positives
et pas les nombreuses prédictions négatives.
D'autres,
comme la prédiction faite à Catherine de Medicis par
son astrologue qu'elle mourrait près de Saint-Germain demeurent
problématiques : elle ne mourut pas à Saint-Germain-en-Laye
mais le nom de son confesseur aurait été Saint-Germain.
Même
s'il s'avérait qu'il s'agisse non d'une légende urbaine
mais d'un fait, l'on peut soutenir que cet exemple montre clairement
que l'on peut toujours trouver une « explication » allant
dans le sens de la voyance même lorsque l'on s'écarte
pourtant du champ de la prédiction stricto sensu : il s'agit
d'un biais positif d'interprétation.
L'on
est tout autant en droit de s'interroger sur le "stricto sensu
" c'est à dire de l'expresssion à la lettre de
l'oracle : que la phrase "près de St Germain' ait été
comprise par Catherine de Medicis comme 'près de St Germain
en Laye' est chose certaine, mais il n'empêche que la prophétie
se serait bel et bien réalisée vu que la Reine mourut
près de son confesseur - un certain St Germain paraîtrait-il...
On
peut aussi considérer la voyance comme une extrapolation
intuitive du cours des événements, s'appuyant sur
un certain nombre de données considérées comme
signifiantes (les signes). Vu sous cet angle, le fonctionnement
de la voyance diffère très peu de celui du «
dire d'expert » très valorisé socialement depuis
la fin du XXème siècle dans de nombreux domaines (politique,
sciences humaines, sociologie etc.)
Points de vue scientifiques
La voyance fait l'objet d'études scientifiques à la
fin du XIXème siècle avec la "Society for Psychical
Research" fondée à Londres en 1882.
En
France c'est en 1919 qu'est fondé l'Institut Métapsychique
International (IMI). Il se définit comme « une alternative
officielle entre les dérives de la crédulité
et l'excès de scepticisme ».
La
recherche fait de grands progrès dans les années 1930
aux États-Unis, sous l'impulsion de Joseph Banks Rhine qui
développe des méthodes d'analyse statistique rigoureuses
pour tenter de définir le phénomène.
Depuis,
de nombreux protocoles d'expérience ont été
mis en œuvre. Le plus célèbre d'entre eux est
l'expérimentation StarGate aux États-Unis. En 1974
et pendant 20 ans, la CIA a coordonné et dépensé
plusieurs millions de dollars dans un programme de recherche sur
la clairvoyance destiné à trouver et tester des médiums.
L'armée américaine fera ainsi appel à des espions
psy tels que Joseph McMoneagle, capable de décrire à
distance des cibles stratégiques, découvrir des caches
ou retrouver des prisonniers avec parfois pour seule base des coordonnées
de longitude et de latitude.
Plus
engagé dans le rationalisme, un Laboratoire de Zététique
a été créé en 1998 à l'Université
de Nice en lutte contre la "pensée irrationnelle"
dans le but de former chez l'individu « une capacité
d'appropriation critique du savoir humain ».
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